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Première et quatrième de couverture de l'album
Jean Monnet, bâtisseur d’Europe
par
Jeanne Puchol et
Catherine Cazalé
Mise en couleur : Isabelle Labbé
PVP : 12,50 €
21 x 29,5 cm, 56 pages couleur - Cartonné - ISBN 2-84856-075-4 - EAN 9782848560755
Publication : octobre 2006
A la veille du cinquantième anniversaire des traités de Rome (25 mars
1957) instituant la CEE et l’Euratom, Arthur, Carmen, Emilie, Lucas et
Malika, élèves du Lycée Jean Monnet de Cognac, décident de créer un
site internet sur la vie et l’œuvre de Monnet. Mais comment retracer,
sur un mode interactif, le parcours de ce discret et infatigable
constructeur d’Europe ? En demandant à ce singulier Charentais de
réapparaître quelques heures... Chacun à son tour, les cinq lycéens
s’entretiennent avec Jean Monnet. Dans ce passionnant récit, on voit
Monnet poser les jalons de l’Union européenne, dès le début de la
Grande Guerre. Sa route croise celles de Churchill, Roosevelt, Tchang
Kai-Chek et de Gaulle... Sa nomination à la direction du Commissariat
au Plan (1946) offre à Jean Monnet la possibilité de réconcilier la
France et l’Allemagne dans le grand projet de la CECA, que lance Robert
Schuman en accord avec Konrad Adenauer le 9 mai 1950. Le Benelux et
l’Italie adhèrent immédiatement à l’entreprise franco-allemande. Devenu
président de la Haute Autorité de la CECA, Monnet aura été l’un des
initiateurs des traités de Rome.
Destiné prioritairement aux lycéens, cet album - rendu
très vivant par l’alternance de scènes au présent et d’évocations du
passé - est basé sur une documentation irréprochable et peut intéresser
un large public.
Publié avec le soutien de la Région Poitou-Charentes.
Un document pédagogique d’exploitation dans les classes est en préparation au CRDP du Poitou-Charentes.
Jean Monnet, builder of Europe
by Catherine Cazalé and Jeanne Puchol
On
the eve of the 50th anniversary of the Treaty of Rome (March 25 1957),
which established the EEC and Euratom, Arthur, Carmen, Emilie, Lucas
and Malika, students at the Jean Monnet Secondary School of Cognac,
decide to create an Internet site on the life and work of Monnet. But
how to portray in an interactive mode the career of this discrete and
untiring builder of Europe ? And how to resurrect for a few hours this
singular native of the Charente ? Each in turn, the five students
converse with Jean Monnet. In this exciting account we observe Monnet
as, from the beginning of the First World War, he paves the way for the
European Union. His path crosses that of Churchill, Roosevelt, Tchang
Kai-Check and de Gaulle … His nomination as head of the Plan (1946)
allows him to reconcile France and Germany to the grand project of the
ECSC, which is launched by Robert Schuman in accord with Konrad
Adenauer on 9th May 1950. The Benelux countries and Italy immediately
adhere to the Franco-German undertaking. Nominated President of the
High Authority of the ECSC, Monnet was one of the originators of the
Treaty of Rome.
Primarily destined for secondary school students,
this album – enlivened by alternating scenes of the present and
recollections of the past – is based on irreproachable documentation
and will be of interest to a wide audience.
It is published with the
support of the Poitou-Charentes Region. A teaching document for use in
class is in preparation in association with the PDRC (pedagogic
documentation and research centre) of Poitou-Charentes. (Traduit du
français par Vicky Cole-Till).
Jean Monnet, costruttore dell'Europa
di Jeanne Puchol e Catherine Cazalé
Poco
tempo prima del cinquantesimo anniversario dei trattati di Roma (25
marzo 1957) che istituirono la CEE e l'Euratom, Arthur, Carmen, Emilie,
Lucas e Malika, alunni del liceo Jean Monnet di Cognac, decidono di
creare un sito Internet sulla vita e l'opera di Monnet. Ma come
illustrare, in modo interattivo, il percorso di questo discreto e
instancabile creatore dell'Europa ? Chiedendo a questo singolare
signore della Charente di riapparire per alcune ore … Uno alla
volta, i cinque allievi si intrattengono con Jean Monnet.
In questo
appassionante racconto, vediamo Monnet porre le basi dell'Unione
europea fin dall'inizio della prima guerra mondiale.. La sua strada
incrocia quelle di Churchill, di Roosevelt, Tchang Kai-Chek e de
Gaulle... La sua nomina alla direzione del Commissariato al Piano
(1946) dà a Jean Monnet la possibilità di riconciliare Francia e
Germania nel grande progetto della CECA che Robert Schuman mette in
moto in accordo con Konrad Adenauer il 9 maggio 1950. Il Benelux e
l'Italia aderiscono immediatamente all'impresa franco-tedesca.
Diventato presidente dell'alta autorità della CECA, Monnet sarà uno
degli iniziatori dei trattati di Roma.
Destinato in modo prioritario
agli studenti delle scuole medie superiori, quest'album - reso molto
vivo dall'alternanza di scene al presente e di evocazioni del passato -
è basato su una documentazione rigorosa e può interessare un ampio
pubblico.
Pubblicato con il sostegno della regione Poitou-Charentes.
Un documento pedagogico da utilizzare nelle classi è in preparazione al
CRDP (Centro di Ricerca e di Documentazione pedagogica) del
Poitou-Charentes. (Traduit du
français par Daniela Attanasio).
Interview de Catherine Cazalé et de Jeanne Puchol par Laurent Lessous
Comment avez-vous été amenées l'une à écrire un scénario de BD sur la vie de J. Monnet et l'autre à la dessiner ?
Catherine Cazalé : Tout à fait par hasard. Cependant, avant de vous préciser ce qui m’a amenée
à écrire un scénario de BD sur la vie et l’œuvre de J. Monnet, je dois
d’abord vous confesser qu’avant de rencontrer Jeanne Puchol, la BD
était aussi éloignée de moi que la comète de Haley. Bref, à l’occasion
d’une conférence-débat sur le peu de visibilité des femmes-auteurs de
bande dessinée, animée par Jeanne Puchol, Chantal Montellier Johanna
Shipper…, je découvris un univers captivant à côté duquel j’étais
passée, par paresse? ignorance ? a priori ? Pour ne pas mourir idiote,
j’ai essayé de rattraper le temps perdu en lisant les livres de ces
auteures et de leurs confrères. La vie a fait le reste. Je me suis liée
d’amitié avec Jeanne Puchol, ce qui nous a conduit à échanger sur nos
projets respectifs, dont celui concernant Jean Monnet. En janvier 2005,
l’éditeur Thierry Groensteen a proposé à Jeanne Puchol de réaliser une
BD sur Monnet à paraître l’année suivante. Elle n’a dit ni oui, ni non,
se laissant le temps de la réflexion. Lorsqu’elle m’en a parlé, Jeanne
m’a confié que, compte tenu des délais, il lui serait impossible de
faire le dessin et le scénario, celui-ci exigeant, en amont, un travail
historique rigoureux.
Jeanne Puchol : En
effet j’ai hésité un certain temps : la biographie en bande dessinée me
semble un genre périlleux, je n’en connais pas d’exemple réussi.
Certes, j’ai réalisé trois récits biographiques avec L. F. Bollée 7,
mais les vies des personnages choisis et le parti adopté par le
scénariste m’ont permis un traitement largement onirique. Le travail de
documentation pour les images ne me fait pas peur, je l’ai déjà
accompli pour d’autres albums. En revanche, une approche documentaire
du récit est très éloignée de ma propre démarche de scénariste: les
récits que j’ai écrits sont marqués par le décalage, l’absurdité,
volontiers anachroniques. De plus, je venais juste de commencer le tome
7 des « Abîmes du temps » pour Albin Michel8 et le temps imparti pour
mener à bien la bio de Monnet me semblait insuffisant pour que
j’accomplisse moi-même le travail de recherche historique. À
quel scénariste m’adresser ? Quand Catherine Cazalé m’a proposé de
relever le défi, j’ai été immédiatement convaincue que, néophyte en
bande dessinée, elle trouverait des solutions scénaristiques
originales. Je ne me suis pas trompée… notre projet a été retenu par la
Région.
C.C.: Qu’est-ce qui m’a poussée à lui proposer d’écrire
le scénario ? La personnalité de Jean Monnet ? Assurément. En
Européenne convaincue, l’idée de faire découvrir, aux jeunes
générations, la vie et l’œuvre d’un des pères de l’Europe, dans un
album de bande dessinée, me motivait. Jeanne Puchol a proposé à son
éditeur que j’assure l’écriture du scénario. Après lecture du synopsis
que je lui ai envoyé, Thierry Groensteen a accepté que je prenne en
charge le scénario. C’est ainsi que l’aventure a commencé.
Quelles ont été les différentes étapes de votre travail ? Quelles sont vos sources principales ?
C.C.: Quand
on s’attaque à une biographie, la première étape du travail consiste à
lire attentivement les ouvrages écrits par la personnalité dont on doit
retracer la vie et l’œuvre. Dans le cas de Jean Monnet, le livre de
référence est et reste ses “Mémoires“ (641 pages) parues aux éditions
Fayard en 1976. Ce livre est donc devenu mon livre de journée et de
chevet pendant toute l’élaboration des pages historiques du scénario.
Après lecture et relecture des “Mémoires“ de Monnet, nous avons, avec
Jeanne Puchol, fait le voyage de Lausanne pour rencontrer le professeur
Henri Rieben, président de la Fondation Jean Monnet pour l’Europe,
créée par Monnet en 1978. Ce choix s’est imposé, parce que nous savions
que la fondation mettait à la disposition des chercheurs et des
universitaires des archives importantes sur les origines et le
développement des Communautés européennes, notamment les archives de
Jean Monnet et Robert Schuman…Mais aussi parce qu’elle offrait à tous
les publics les services d'une médiathèque comprenant un fonds de 8.000
photos sur Jean Monnet et la construction européenne, des interviews de
protagonistes de cette construction, des anciens films relatifs à Jean
Monnet et à son oeuvre, et un recueil d'émissions télévisées et
radiodiffusées actuelles sur l'Europe.
Bien qu’intriguée, Madame
Claire Camperio-Tixier, documentaliste de la fondation, nous a
accueillies avec enthousiasme. C’était la première fois qu’elle voyait
débarquer des auteurs de bandes dessinées dans ce haut lieu de la
mémoire de l’idéal européen. Le professeur Rieben, aujourd’hui disparu,
nous a également reçues et longuement interrogées sur l’œuvre de Jean
Monnet. A l’issue de l’entretien, il nous a offert des livres, dont à A
L’écoute de Jean Monnet1 et un film (VHS) dans
lequel Jean Monnet évoque quelques figures de la construction
européenne. “A L’écoute de Jean Monnet“ devint mon second livre de jour
et de chevet. D’autres ouvrages m’ont accompagnée tout au long de mon
travail d’écriture, le Jean Monnet2 d’Eric Roussel, l’excellent “L’Europe petite histoire d’une grande idée3“ de Benjamin Angel et Jacques Lafitte, “Jean Monnet, l’Eu et les chemins de la paix4“ de Gérard Bossuat et Andreas Wilkens, “l’Histoire de la construction européenne de 1945 à nos jours5“ de Marie-Thérèse Bitsch, “Après l'Etat-nation. Une nouvelle constellation politique6”, de Jürgen Habermas. Pour compléter mes lectures, je surfais quotidiennement sur Internet.
Hormis les deux sites consacrés à Jean Monnet et Jean Monnet, je me suis abreuvée au site luxembourgeois
"European Navigator, Centre Virtuel de la Connaissance Européenne",
qui offre, en ligne, une impressionnante documentation papier,
photographique, audio, vidéo, etc. Mais aussi au site des archives
historiques de l'institut européen de Florence en Italie ou encore à celui de la Chaire Jean Monnet de l’université de Montréal, sans oublier celui du centre européen Robert Schuman ni, bien sûr, tous les sites officiels dédiés à l’Europe, dont l'Ec. Europea
qui permet de télécharger les très précieuses 12 leçons sur l’Europe de
Pascal Fontaine, ancien collaborateur de Jean Monnet et professeur à
l’Institut d’études politiques de Paris.
Telles
ont été mes sources principales. A ce stade, j’aurais pu écrire un
scénario linéaire mettant en scène les événements clefs de la vie et de
l’œuvre de Jean Monnet, de sa naissance à son entrée au Panthéon. Mais
le fait que notre éditeur nous ait spécifié que la bande dessinée
devait, en priorité, s’adresser à des lycéens, me donna envie d’en
faire des protagonistes. Avec Jeanne Puchol, nous sommes donc allées au
lycée Jean Monnet de Cognac pour nous entretenir de notre projet avec
le proviseur de l’établissement. Nous avons été accueillies aussi
chaleureusement qu’à la fondation Jean Monnet. La visite du lycée avec
sa salle où, en quelques minutes, il était possible d’installer une
exposition sur Jean Monnet (offerte par la fondation du même nom) mais
aussi avec son jardin dans lequel s’élevait un buste du père de
l’Europe, me décida à introduire dans le scénario le décor du lycée et
cinq de ses élèves de classe de seconde. C’est dire que le scénario
présenterait et présente deux niveaux narratifs. L’un historique
(renvoyant au passé) et l’autre fictif (axé sur le présent).Comme il
s’agissait d’un récit en images, j’ai demandé à Jeanne Puchol de les
accentuer en adoptant une mise en couleur distincte. Passé et flash
back sont donc en sépia et le présent en quadri.
J.P.: Pour
les passages historiques, j’ai utilisé les images de « À l’écoute de
Jean Monnet » et d'un très bel album sur la déclaration Schuman, deux
livres offerts par Monsieur Rieben. Tous deux abondamment illustrés en
ce qui concerne Monnet et ses collaborateurs. J’ai beaucoup surfé sur
le site de la Fondation ainsi que sur celui de l’Association Jean
Monnet. J’ai complété avec des images trouvées sur Internet, en
particulier sur les sites des institutions européennes, avec une
mention particulière à l’European Navigator luxembourgeois, qui s’est
révélé être une mine inépuisable. Pour les grands épisodes historiques,
comme les deux guerres mondiales, j’ai travaillé à partir de livres
trouvés en bibliothèque. Et puis j’ai pioché dans mes archives
personnelles pour des choses aussi diverses que les uniformes des
soldats anglais de la 1ère Guerre, les affiches de la Guerre froide ou
la Chine des années 30…
Pour
les passages contemporains, j’ai réalisé une première série de
photographies, sur le lycée, les chais Jean Monnet et Cognac, que j’ai
complétée en octobre au cours du Salon Polar & Co où j’étais
invitée pour signer « Les Jarnaqueurs9 ».
Puis
est venue la création des personnages. Pour les adolescents, je me suis
inspirée d’amis, de nos neveux et nièces, de souvenirs de mes copains
de classe. Comme le dialogue entre les lycéens tourne essentiellement
autour de Jean Monnet, il fallait les caractériser, j’ai donc associé à
chacun un style vestimentaire bien marqué qui permet à la fois de les
identifier immédiatement et de compléter leur « profil » psychologique.
Ainsi,
Lucas, adepte de skate et de jeux vidéo porte les pantalons baggy, les
sweats, les vestes et la casquette de rigueur. Pour ne pas cantonner
Arthur à son rôle de Je-sais-tout, je l’ai habillé comme les gauchistes
que je côtoyais au lycée dans les années 70 (elles sont, on le sait,
revenues à la mode) : jeans patte d’éléphant, veste et parka de surplus
militaire, les cheveux mi-longs apportant une touche romantique au
personnage. Émilie doit ressembler à Lucas, son frère jumeau, mais ne
doit pas être prise pour un garçon : autour de ses boucles d’oreille,
j’ai créé un style vestimentaire moderne et graphique, d’un aspect
strict mais féminin (veste à boutons façon officier, caban…). Émilie
est brune à cheveux courts, Carmen sera blonde à cheveux longs.
Sportive et nature, elle arbore une garde robe simple, faite de
t-shirts, de gilets, de vêtements « outdoor ». Enfin Malika, moitié
bretonne, moitié algérienne, d’un milieu moins aisé que ses camarades,
pratique les superpositions : blousons courts sur sweats à capuche ou
pulls longs, pantalons de treillis.
Côté
personnages secondaires, le proviseur est fidèle à la réalité alors que
la prof d’histoire-géo est inventée. Les autres élèves ont été créés à
partir de croquis réalisés dans la rue à Cognac ou lors du Salon
Polar&Co.
Quant à Thierry, l’ami belge, c’est une version rajeunie de Thierry
Groensteen, notre éditeur.
Et
Jean Monnet ? comment le représenter lors de ses rendez-vous avec les
lycéens ? Quel âge lui donner ? Comme je n’ai pas trouvé de réponse à
ces questions, je me suis débrouillée pour qu’on ne voie jamais son
visage : pénombre, personnage de dos ou de trois quarts dos, amorces,
chapeau… Après tout, Monnet ne se définissait-il pas lui-même comme un
personnage de l’ombre ? En dehors des séquences sépia où je l’ai
représenté tel qu’il était aux périodes évoquées, Monnet n’apparaît à
visage découvert qu’à la fin de l’album, dans son dernier rendez-vous
avec les jeunes dans le parc de Cognac : il est devenu un
personnage public.
Une fois la création des personnages menée à bien, je me suis mise à la bande dessinée proprement dite.
Pouvez-vous
nous présenter par exemple ces différentes étapes jusqu’à la planche
finale ? ( Source écrite, synopsis, story-board, crayonné, planche
éditée)
C.C.: Pour ma part, j’ai pris le parti du
découpage chronologique et m’y suis tenue. Dès le synopsis, j’ai
présenté ce plan à l’éditeur :
I- 1888-1914
Les années d’apprentissage
1) Une enfance à Cognac
2) Les 1ers voyages à l’étranger (City de Londres et Winnipeg au Canada)
II- 1914-1918
1) Septembre 1914, rendez vous avec Viviani (président du conseil) à Bordeaux.
2) 1916, le Wheat executive (commission interalliée pour les approvisionnements en blé)
3) Bureau commun de ravitaillement allié et organisation du premier "pool" maritime
III- 1919-1923
1)
1919, Monnet participe à la création de la Société des nations (SDN)
dont il devient Secrétaire général adjoint d'Eric Drummond
2) 1923, Monnet quitte la SDN, pour se consacrer à la gestion de l’entreprise familiale en difficulté
IV- 1923-1938
1) 1923-1927 Redressement de l’entreprise familiale
2)
1927-28, Monnet participe au relèvement économique de certains pays de
l’Europe de l’Est, contribue à la stabilisation du zloty en Pologne et
du leu en Roumanie.
3) 1929, Monnet fonde (à 41 ans) et co-préside
une grande banque américaine à San Francisco, la
Bancamerica-Blair. Il devra s'en éloigner après un échec dû à la crise
boursière de 1929.
4) La même année, Monnet rencontre sa future épouse Silvia de Bondini.
5) 1934-36, Monnet est appelé en Chine comme conseiller spécial de Tchang Kai-Check.
6)
1938, Monnet est envoyé par le président du Conseil, Edouard Daladier,
en mission secrète aux Etats-Unis pour y acheter des avions de guerre
américains
V- 1939-45
1) 1940, En pleine
débâcle française, Monnet propose, en juin, un projet d’Union totale
franco-britannique. Avec l’arrivée de Pétain au pouvoir, ce projet
échoue. Le 17 juin 1940, Monnet reçoit à son domicile londonien le
général de Gaulle (le veille de l’appel du 18 juin)
2) A Londres,
Monnet préside le comité de coordination franco-britannique pour la
mise en commun des ressources alliées. Puis, est envoyé à Washington
par les Anglais, pour négocier l’achat de matériel militaire, avec le
Président Roosevelt. Monnet joue ainsi un rôle déterminant dans
la conception et la mise en œuvre du "Victory Program" (1942) qui
permettra de faire des Etats-Unis "l'arsenal des démocraties".
3)
1943, membre à Alger du 1er gouvernement de la France libre (jusqu’en
1945), Monnet organise l'armement des Forces Françaises qui
participeront à la libération du territoire.
4) 1945 Monnet s’installe à Houjarray
VI-1945-1950
1)
1946-1950, Monnet fonde et dirige le Commissariat au Plan pour
équiper et moderniser la France. Il en devient le premier président.
VII- 1950-1955
1)
Avril 1950, dans sa maison d’Houjarray, Monnet conçoit la CECA :
Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier (Plan Schuman) dont il
préside la Haute Autorité. L'Europe communautaire devient une réalité.
2) 1952-55, Monnet préside la Haute Autorité de la CECA
VIII -1955-1-975
1)
1955, Monnet démissionne de la présidence de la CECA, et fonde le
Comité d’action pour les Etats-Unis d’Europe qui rassemble les
principaux responsables politiques et syndicaux européens.
2) Monnet joue un rôle décisif dans les étapes successives de la construction européenne:
a) Traités de Rome sur le marché commun
b) EURATOM,
c) Entrée de la Grande-Bretagne dans la Communauté (1961-1963)
d) Conseil Européen (1972-75)
e) Élection du Parlement Européen au suffrage universel
f) Union monétaire, etc...
3) Le Comité d'action pour les États-Unis d'Europe en faveur de l'union œuvre jusqu'à sa mort, le 16 mars 1979, à 91 ans.
IX- 1976-1988
1) 1976, Monnet se retire à Houjarray (Yvelines) où il rédige ses Mémoires
2) 1979 le 16 mars Il meurt à Houjarray à 91 ans.
3) 1982 (mort de Silvia, épouese de Monnet) La Maison de Jean Monnet devient propriété du Parlement européen
4)
1988 A l’initiative du président François Mitterrand, les cendres de
Monnet sont transférées au Panthéon en présence des chefs d'états
européens.
Pour rendre vivante l’histoire des grandes étapes de la
vie de Monnet, je le fais réapparaître et rencontrer, chacun à son
tour, les cinq élèves du lycée de Cognac qui enquêtent sur son œuvre
pour créer un site Internet dynamique. Qui à Cognac, qui à Paris, qui à
Houjarray, qui à Alger, qui à Rome. Le sujet des entretiens entre
Monnet et les lycéens est pris dans le plan (ci-dessus).
Prenons un autre exemple. Dans mon découpage au chapitre V- Période 1939-45, j’ai
listé les événements importants à couvrir comme : La débâcle française
(1940), la proposition de Monnet d’une Union totale franco-britannique
(juin 1940), la présidence de Monnet au comité de coordination
franco-britannique pour la mise en commun des ressources alliées,
Churchill envoyant Monnet à Washington pour négocier l’achat de
matériel militaire et mettre en œuvre le "Victory Program (1942). Tous
ces événements sont traités en cours d’histoire avec l’ensemble de la
classe (pages 26, 27, en couleur).
Les années 1943-1945, pendant lesquelles Monnet est à Alger et devient
membre du 1er gouvernement de la France libre (jusqu’en 1945), pour
partir ensuite aux U.S.A. où il organise l'armement des Forces
Françaises qui vont participer à la libération du territoire, ces
années sont racontées par Jean Monnet à Malika, à Alger même (pages 29,
30, sépia).
Pourquoi ai-je choisi de faire parler Jean Monnet de l’épisode d’Alger, plutôt que de la débâcle française ?
Malika,
élève du lycée jean Monnnet de Cognac, est franco-algérienne et passe
ses vacances de Noël dans sa famille à Alger. Bien qu’étant un
personnage de fiction, l’identité mixte de Malika est comparable à
celle d’autres jeunes français. Il me semblait important de prendre en
compte la complexité de la société française, quarante ans après la
décolonisation et de la restituer dans notre bande dessinée. C’était
aussi un moyen de voyager dans un pays avec lequel la France n’a jamais
cessé d’avoir des liens.
On sait que Monnet n’est devenu une
personnalité publique que lorsqu’il a été nommé Commissaire au plan en
1946. Pour respecter ce passage de l’ombre à la lumière, nous avons
convenu, avec Jeanne Puchol, de ne montrer son visage qu’à partir de
cette date. Si Jean Monnet devient une figure institutionnelle après
guerre, c’est en 1950 (au moment du lancement de la CECA) qu’il est
internationalement connu et reconnu de tous en faisant la couverture du
Time.
Tout au long de
l’enquête que font nos cinq lycéens de Cognac, j’ai été attentive à ce
que l’un ou l’autre soit en contact avec des lycéens des pays qui ont
formé la première communauté européenne. Écrivant sur Jean Monnet, il
me paraissait fondamental que notre bande dessinée ne soit pas un album
franco-français. Je veux dire que si, en France, Jean Monnet et Robert
Schuman se partagent la paternité de l’union européenne, ils ne sont
pas les seuls à avoir œuvrer dans le sens de l’union. En Belgique, par
exemple, le père de l’Europe est Henri Spaak. En Italie, Altiero
Spinelli… Pour la même raison, l’album ne se termine pas au Panthéon (à
Paris) mais à Rome, sur les marches du Campidoglio qui s’ouvrent sur la
mairie de la capitale italienne où ont été signés les traités de Rome.
Tous
les initiateurs de l'union européenne ont été réunis à Rome, villa Ada,
immense jardin public, où chaque allée porte un de leur nom .
Le défi, jusqu’à la page finale, a été de raconter la captivante histoire d’un homme remarquable en 56 planches.
J.P: Pour répondre à votre question sur les différentes étapes de mon travail, Je vais me servir de la première planche de l’album.
Catherine
Cazalé a pris un parti original dans cette première planche, celui de
nous plonger immédiatement dans un dialogue nourri entre les lycéens.
L’abondance
du texte ne me laisse pas l’espace pour une grande case d’installation
de l’action, comme c’est fréquemment le cas en début d’album. Je
réalise une première esquisse.
Le découpage
écrit prévoyait 8 cases. Je le ramène à 7, pour avoir des images plus
grandes et éviter d’être redondante dans les plans consacrés à
l’échange entre les adolescents. Mais cette esquisse ne me satisfait
pas, en particulier parce que le décor n’est pas suffisamment planté.
C’est pourquoi, dans la deuxième version, j’ai introduit le plan de
coupe de la case 4, la vue extérieure du lycée, à la fois pour situer
l’action, et pour faire « respirer » une planche se déroulant par
ailleurs uniquement en intérieurs.
Cette
esquisse, agrandie au format A3, sert de base au crayonné définitif,
reporté par transparence à la table lumineuse. J’en précise les
détails, après quoi j’encre mon dessin, à la plume et au pinceau pour
les surfaces plus grandes.
L’éditeur fait
réaliser un scan de la page en noir et blanc, sur lequel Isabelle
Labbé, la coloriste, va pouvoir appliquer les couleurs.
Comment avez-vous travaillé ensemble ?
C.C.: Au
fur et à mesure de l’écriture du scénario, je donnais à lire
à Jeanne dialogues et récits déjà rédigés et nous en parlions. Parfois, elle me
convainquait de raccourcir tel fragment de texte ou, au contraire, d’en
expliciter un autre. Le fait de pouvoir lire en live le scénario en
train de s’écrire lui permettait (je crois) de penser les personnages
de l’histoire et de former les premiers dessins.
J.P.: De
même que Catherine m’a soumis son dialogue au fur et à mesure de
l’écriture, je lui ai soumis les esquisses des pages, en argumentant
les modifications qu’elles comportent. Ces modifications ne portaient
en général pas sur son texte, mais sur le découpage, comme je l’ai
détaillé dans les réponses précédentes. Cet échange a été
particulièrement important pour les images métaphoriques des séquences
sépia, dont nous discutions longuement les crayonnés jusqu’à ce que
nous en soyons satisfaites toutes les deux.
Catherine Cazalé, avez-vous
travaillé différemment avec votre dessinatrice sur la partie
contemporaine et sur les épisodes de la vie de Monnet vus en flash back
? Avez-vous participé au choix des images métaphoriques par exemple
ceux de la page 10?
C.C.: Bien sûr, même si la partie contemporaine
se veut réaliste, il s’agit d’une fiction, ce qui laisse plus de
liberté à l’imagination. Alors que nous avions de vraies contraintes
lorsque nous abordions les épisodes de la vie de Monnet vus en flash
back. Nous ne pouvions plus imaginer, nous devions coller à la réalité
des époques traitées en utilisant une documentation rigoureuse et en
trouvant la voie métaphorique idoine.
Pour répondre à votre deuxième
question. Je vous dirai qu’il s’est passé à peu près la même chose que
quand je donnais à lire à Jeanne Puchol mon scénario pour avoir son
avis. Autrement dit, dès que Jeanne Puchol a commencé à dessiner, elle
me faisait voir régulièrement ses crayonnées et m’expliquait pourquoi
elle avait traité une vignette de telle façon plutôt que d’une autre.
Si je n’étais pas convaincue par le dessin, je lui disais pourquoi et
elle le reprenait.
Oui, nous avons quelques fois choisi ensemble
certaines images métaphoriques, comme celles des vignettes cinq et six
de la planche 10.
Le dessin de la
vignette cinq symbolise, en trois éléments forts, les voyages de
jeunesse de Jean Monnet : New-York, l’Egypte et le Canada. Au premier
plan, une statue de la liberté, bicéphale, où l’on reconnaît une partie
de celle sise à New York City, réalisée par, le sculpteur français,
Frédéric-Auguste Bartholdi et une partie du visage du sphinx de Gizeh
assortie, dans l’angle, d’une pyramide miniature. Hormis le fait que la
figure renvoie à deux voyages de Monnet, dans deux continents, elle
évoque aussi l’Orient et l’Occident réunis sous l’égide de la Liberté.
La feuille d’érable voletant est, bien entendu, une évocation du
Canada, autre pays que Jean Monnet a visité. La vignette six représente
la première visite de Jean Monnet à New York City, avant la première
guerre mondiale.
Comment montrer New York, avant la grande guerre,
alors que nous avions déjà utilisé l’un de ses symboles dans la
vignette précédente ? En faisant un clin d’œil à l’œuvre d’Alfred
Stieglitz, ce grand photographe américain qui, dès 1903, donna une
vision naturaliste de la ville de New York.
Pouvez-vous, Jeanne Puchol, nous expliquer le choix des 10 images du bas de la planche 9 a la fin de la planche 10?
J.P.: Il
s’agit là de la première séquence sépia de l’album. Pour ces passages
de récit de sa vie par Monnet lui-même, Catherine Cazalé a opté pour
une narration à la première personne s’inscrivant dans des cartouches
au-dessus des vignettes. Autre choix formel : ces pages obéissent au
principe du gaufrier (planche découpée en cases de même dimension) sur
huit images.
Pour éviter une simple illustration du propos, nous
avions dans un premier temps pensé accompagner ce récit d’images
évocatrices de la période relatée (par exemple des scènes de champ de
bataille pour la Première Guerre). Mais ce parti était difficile à
tenir sur toutes les pages concernées.
J’ai finalement proposé à Catherine d’avoir recours à des images de deux sortes :
-
des images à caractère photographique pour les reconstitutions des
scènes évoquées, les portraits des personnalités, les monuments, les
documents d’époque (affiches, une de journaux),
- des images symboliques ou allégoriques relevant de l’illustration de presse pour les passages techniques ou abstraits.
Les deux images du bas de la planche 9 entrent dans la première catégorie.
Pour
la première, je retiens les mots « Cognac », « 1888 », « eau-de-vie »,
« concentration et lenteur ». Associée à la fois à la lenteur et au
passé, une gabarre passe sur la Charente devant le château de François
1er, chargée de barriques. Pour obtenir ce visuel, j’ai télescopé deux
documents trouvés sur Internet, une vue emblématique de la Charente à
Cognac et une photo ancienne de gabarre. La deuxième image suit
davantage le texte. Je me suis inspirée de la photographie de Monnet
enfant dans les chais en supprimant tous les autres personnages pour
donner l’impression de liberté et d’espace
La planche 10 est presque exclusivement constituée
d’images symboliques Celles-ci sont réalisées en associant une
représentation visuelle à un sens (par exemple pays = drapeau) et en
combinant ces représentations… jusqu’à ce que l’ensemble fonctionne.
C’est le principe de la métaphore, doublé d’un glissement sémantique du
registre des mots à celui des images. Pour illustrer notre méthode de
travail, je m’arrêterai aux cases 4, 5 et 6. La première version de la
case 4 représente la Banque d’Angleterre à
Londres, devant laquelle se presse une foule en chapeau melon.
Cette
image réaliste détonne avec le reste de la page. Je décide alors de
garder la structure triangulaire du fronton de l’édifice, je remplace
les colonnes par des piles de pièces, je ne garde que les chapeaux de
ma foule, et voici un ensemble de signes visuels dont la combinaison
signifie « la City de Londres » (enfin, heureusement qu’il y a le texte
dans le cartouche pour le préciser).
C’est au cours d’un rendez-vous où
je lui soumets la première version de la case 5, un peu pauvre visuellement, que Catherine Cazalé a l’idée
d’accoler une moitié du visage du Sphinx de Gizeh et une moitié du
visage de la Statue de la Liberté. J’ajoute la petite feuille d’érable
canadienne, les trois voyages sont ainsi évoqués par des équivalents
visuels. Pour la case 6, je sèche assez longtemps. Je veux représenter
les mots « dynamisme » et « organisation ». Catherine Cazalé m’envoie
la célèbre photo de Stieglitz, montrant les silhouettes des immeubles
de Manhattan au début du XXe siècle. La structure quadrillée des villes
américaines va finir de résoudre le problème : le plan de Manhattan (=
États Unis/organisation) se fond au noir dans les silhouettes, traitées
en ombre chinoise, de ses immeubles (= État Unis/dynamisme)
Qu’est-ce qui vous a le plus surpris dans la vie de Jean Monnet ?
C.C.: Son
incroyable volonté à œuvrer pour la paix et à trouver les moyens de la
réaliser. Volonté servie par une faculté de convaincre hors pair. Mais
aussi son sens de l’Économie et son côté visionnaire. Si on y
réfléchit, Jean Monnet avait prévu la mondialisation et une de ses
réponses consistait à s’y préparer très tôt en construisant une Europe
économique et sociale forte. Son énergie, son incroyable capacité de
travail, son pragmatisme, et sa grande humilité m’ont également
surprise et touchée.
J.P.: Confronté
aux situations les plus complexes, Monnet trouve toujours des solutions
d’un pragmatisme ahurissant dont on se demande bien pourquoi elles ne
sont pas venues à l’esprit des chefs d’Etat qui font appel à lui… Il
semble le plus souvent adapter avec génie des méthodes de gestion
d’entreprise familiale à des problèmes de géo-politique de grande
échelle. L’approvisionnement commun des forces alliées durant la
Première Guerre, bon sang, mais c’est bien sûr !… sauf que personne n’y
a pensé à part lui. Mais ce qui me frappe le plus, c’est son incroyable
force de conviction : il est arrivé à rallier à ses idées, et aux
solutions qu’il préconisait, les hommes les plus influents du XXe
siècle…
1 - Editions Fondation Jean Monnet pour l’Europe et Centre de recherches européennes, Lausanne, 2004 (462 pages).
2 - Fayard, 1996.
3 - Editions Découvertes Gallimard,1999.
4 - Publications de la Sorbonne, Paris, 1999.
5 - Bruxelles, Editions Complexe, 1999.
6 - Fayard, 2000.
7
- “Poète contumace” sur Tristan Corbière, “Asile vénitien” sur le baron
Corvo, “Fleur bleue dans un monde noir” sur Fréhel, parues dans la
revue (A suivre).
8 - “Le temps volé”, scénario Rodolphe, éditions Albin Michel 2006
9 - D'après le roman éponyme de Michel Boujut, éditions 6 pieds sous terre, 2005.
Laurent
Lessous est professeur d'Histoire et grand amateur de bandes dessinés.